Cours no 12: Un plan global d’intervention
interdisciplinaire
Développer
un plan de traitement couvrant l’ensemble des services
Au-delà des guerres d'écoles de pensées, les intervenants en santé mentale d'expérience finissent souvent par utiliser des stratégies communes pour aider les gens. Nos clients n'ont pas suivi de cours leur apprenant comment être un client de telle ou telle école. Leur humanité nous confronte à la réalité. Comment intervenir en santé mentale? Comment toucher le coeur et l'esprit des gens? Voyons d’abord quelques suggestions générales.
Un long silence ne suffit pas. L'intervenant aura à se présenter, à être attentif et disponible dans le contexte d'un lieu permettant la confidentialité où il ne sera pas interrompu. C'est à l'intervenant à s'ajuster au rythme et au niveau de langage du client. C'est souvent en écoutant que nous faciliterons l'expression des émotions, des souhaits, des intentions positives et des efforts fournis.
Le client a besoin d'exprimer ce qui le préoccupe, ce qui l'amène à consulter maintenant. Pour établir un lien avec l'intervenant, il aura besoin d'exprimer ce qu'il considère important pour que l'on comprenne l'évolution de son problème, le sens qu'il lui donne ainsi que son explication personnelle quant aux causes de ce qu'il vit.
Compte tenu de votre mandat et du temps dont vous disposez, recherchez une compréhension de la situation actuelle. Qu’est-ce qui a déclenché le problème actuel? Y a-t-il des changements récents dans sa vie (perte, deuil, problème relationnel exacerbé)? Quels sont les symptômes? Leur ampleur et leur durée? Qu’est-ce qui les amplifient? Qu’est-ce qui les soulagent? Y a-t-il déjà eu des épisodes semblables antérieurement? Ces problèmes surgissent-ils dans un contexte particulier (maladie, médication)? Qu’est-ce qui a amené cette personne à consulter maintenant? Comment explique-t-elle sa situation actuelle? Qu’est-ce qu’elle désire comme résultat?
L’évaluation portera également sur le niveau d’urgence de la crise actuelle. Y a-t-il un risque pour la vie de cette personne? Pour la sécurité des enfants impliqués dans cette situation?
En exprimant ce qu'il souhaite obtenir des rencontres dès le début, le client mobilise son énergie dans une direction positive. En s'interrogeant sur ce qui lui permettra de savoir que l'intervention a été efficace et sur les critères qui permettront de déterminer qu'elle n'est plus nécessaire, il intègre l'idée que l'intervenant en santé mentale ne sera pas toujours là. Il se responsabilise quant à la prise en charge du reste de sa vie.
En fragmentant le chemin à parcourir en plusieurs étapes, en fixant des buts intermédiaires et en déterminant ce qui serait une première étape, l'intervenant favorise l'établissement d'attentes réalistes. Nous chercherons un objectif aussi concret et réaliste que possible, en accord avec les buts personnels de la personne. Nous souhaitons que le client comprenne de quelle façon ses efforts le rapprochent de son but.
Dire que l'on comprend ne suffit pas. Le patient se sentira compris si l'on peut formuler notre perception de la nature du problème. Tout en soulignant que tous les problèmes ne seront pas réglés immédiatement, comme par magie, l'intervenant suscite l'espoir en suggérant une démarche dans la direction désirée. Il établit les priorités, les buts, les objectifs, les options disponibles, les avantages et les coûts pour chacune d’elles et il prépare la continuité des soins.
En précisant comment vous pouvez aider ce client, vous établissez des balises sécurisantes qui lui permettront d'avoir des attentes réalistes à votre égard. Plus le client comprendra votre façon de travailler, plus il pourra collaborer en sachant ce que vous attendez de lui.
Au besoin, clarifiez les règles · Demandez le respect des limites · Responsabilisez. Agissez d'une façon responsable en respectant les règles de la morale, de la déontologie et de l'éthique.
L'intervenant en santé mentale est son propre outil de travail. Il importe donc qu'il se connaisse le mieux possible. Cela lui apprendra à s'utiliser plus efficacement, à mieux planifier son développement et à éviter d'aller au-delà de ses compétences. La connaissance de soi permet en effet de connaître ses limites. Elle permet également de connaître son idéal et de réviser ses critères d'évaluation afin d'éviter de se demander l'impossible.
L'intervenant en santé mentale a-t-il le droit de prendre des vacances alors que certains de ses clients menacent de s'ouvrir les veines ou de faire une grève de la faim? Il est parfois prioritaire de prendre soin de soi-même, sans quoi il deviendra impossible de faire quoi que ce soit. Nul ne peut être disponible en tout temps. Ce n'est ni souhaitable ni nécessaire.
En déterminant ses limites, on responsabilise le client et on le laisse libre d'utiliser d'autres ressources. S'il ne prend pas soin de lui-même, l'intervenant risque l'épuisement. Il vaut donc mieux établir un réseau de support constitué de personnes fiables, compétentes et disponibles.
Observez attentivement le mode de pensée de la personne que vous aidez. Invitez-la à se poser des questions fécondes. Comparez les efforts à fournir avec les ressources disponibles · Évaluez les risques réels associés au changement et les avantages anticipés. Invitez-la à se faire des commentaires utiles et se donner des directives efficaces.
1. Vous pensez vraiment cela? Comment en êtes-vous venue à penser ainsi? Avez-vous déjà eu un point de vue différent?
2. Comment en êtes-vous venu à vous sentir ainsi? Que s'est-il passé? Que vous êtes-vous dit? Qu'avez-vous imaginé?
3. Quel sens donnez-vous à cet événement? Que signifie-t-il pour vous?
4. Peut-il y avoir une autre explication? Est-il possible que cette situation signifie autre chose que ce que vous croyez?
5. Comment verriez-vous cette situation si vous n'étiez pas en détresse? Comment verrez-vous cette situation dans une semaine? Un an? Cinq ans?
6. Considérez-vous une simple hypothèse comme une certitude? Comment pourriez-vous vérifier cela?
7. Pensez-vous en termes de tout ou rien? De noir ou blanc? Y a-t-il des nuances à faire?
8. Vous concentrez-vous à l'excès sur un aspect de la réalité en oubliant le reste? Oubliez-vous vos forces, vos ressources et l'assistance que vous pouvez obtenir?
9. Considérez-vous qu'un événement ou une remarque vous concerne personnellement lorsque ce n'est pas nécessairement le cas?
10. Que souhaitez-vous? Comment aimeriez-vous que cela se passe? Que pourriez-vous commencer à faire pour augmenter vos chances de voir se produire ce que vous souhaitez? Quels sont les choix possibles?
Certaines personnes n'ont pas accès à leurs émotions. L'intervenant en santé mentale les aidera à faire plus de place aux émotions dans leur vie. D'autres sont continuellement submergées par leurs émotions. Elles atteignent une durée, une fréquence et une intensité telles qu'elles les paralysent ou les rendent inefficaces. L'intervenant en santé mentale les aidera à remettre leurs émotions à leur place pour retrouver l'accès à leur capacité de raisonner et de faire des plans. Les étapes de résolution de problème peuvent nous aider à utiliser notre capacité d’utiliser notre capacité de raisonner.
Étapes Questions/ Actions
l. Identification du problème l. Qu'est-ce qui me préoccupe?
Définissez le stresseur ou la réaction de
stress comme un problème à résoudre.
2. Choix d'un but 2. Qu'est-ce que je veux?
Fixez-vous des buts réalistes et concrets
3. Imagination de différentes solutions 3. Qu'est-ce que je peux faire?
Imaginez un grand éventail de solutions
possibles. Vous pouvez imaginer
ce que feraient d'autres person-
nes dans une telle situation (un ami, un
conjoint, une personne habile dans ce
domaine, etc.)
4. Exploration des avantages et inconvénients 4. Qu'est-ce que cela me donne-
Évaluez les avantages et les inconvénients rait et à quels coûts?
de chaque solution.
5. La décision 5. Qu'est-ce que je choisis?
5.1 Placez les solutions dans l'ordre en
commençant par la moins pratique et
la moins souhaitable.
5.2 Choisissez.
6. Pratique mentale 6.Est-ce que je peux le faire?
Imaginez-vous en train d'appliquer la
solution que vous avez choisie.
7. Application 7. Maintenant, fais-le!
Essayez cette solution.
8.Evaluation 8. Est-ce que cela a été efficace?
Reconsidérez le problème selon les effets obtenus.
Nous souhaitons favoriser l'autonomie dans les activités de la vie quotidienne. Certaines personnes devront apprendre, côte à côte avec des intervenants qui les éduquent, comment gérer leur hygiène, leur temps, leur agent et leurs activités.
Notre histoire personnelle nous façonne. Elle nous aide à donner un sens à notre expérience. Il n'est pas toujours nécessaire d'y puiser abondamment. Certains problèmes se règlent par un enrichissement du présent: apprendre à s'affirmer, à résoudre des problèmes, à mieux communiquer, à se détendre et à mieux prendre soin de soi. Une vie satisfaisante soigne bien des blessures. L'importance que l'on accordera au passé dépendra de son poids dans la balance du présent.
L'intervenant en santé mentale n'est pas là pour satisfaire les besoins personnels du client. Cela créerait une relation de dépendance où l'intervenant devient un "ami payé". L'intervenant est plutôt là pour explorer avec lui comment il peut aller satisfaire ses besoins auprès des gens de son entourage.
Il souhaitera plutôt que la personne qui le consulte multiplie les expériences relationnelles positives pour qu'il ait moins besoin de comportements rigides ou excessifs pour satisfaire ses besoins. L’établissement d’un réseau d’amis et d’une possibilité d’emploi constitue des exemples d’enrichissement du milieu de vie.
Encouragez votre client à maintenir et à agrandir son réseau social. Prenez soin de vérifier si votre client est déjà sous les soins d'un autre intervenant et évitez de saboter le plan de traitement déjà en place. Collaborez avec les familles et les autres aidants. Notre intervention tient compte du milieu, avec une ouverture à la possibilité que les comportements soient encouragés à l'intérieur d'un système social donné, et que le changement personnel puisse devoir passer par un changement ou une négociation à l'intérieur de ce système social.
Nous souhaitons que la personne puisse bénéficier des avantages associés au fait d’être citoyen à part entière d’une communauté dont le tissu social l’aideront à avoir une meilleure qualité de vie.
Le monde médical détient un pouvoir dont il faudra tenir compte sans devenir servile, et sans nier sa propre zone de pouvoir. Y a-t-il un problème physique? Psychiatrique? Y a-t-il une médication? Y a-t-il eu des hospitalisations antérieures? Qu'est-ce qui a aidé? Quels sont les rôles de chacun ?
Les plus démunis auront besoin d’aide pour se défendre contre les gens qui abusent de leur situation de pouvoir. Cette aide s’opposera aux abus des institutions financières, des employeurs et des propriétaires de logements mais aussi aux abus associés aux habitudes néfastes prises par certains intervenants du domaine de la santé et des services sociaux.
La personne a-t-elle besoin d'information? Est-elle au courant des aspects légaux de sa situation: confidentialité, choix libres et éclairés, gestion financière, risques des comportements illégaux? Est-elle victime de contraintes excessives?
Il nous faudra jusqu’à la fin ajuster le niveau de support et de structure aux besoins réels de la personne. Prenez le temps d'évaluer à nouveau la nature du problème. Il peut avoir changé. Il peut être résolu. Le véritable but des rencontres peut être devenu plus clair. Vous pouvez également constater l'inutilité de votre intervention et y mettre fin. Reconnaissons humblement les limites de nos capacités.