Vivre le deuil
Mentionnons d'abord que si vous êtes en
état de deuil, rien ne sert d'éviter la tristesse.
Vous pourriez avoir envie de sauter dans
la face de la personne qui vous demande d’un ton bienveillant: "Comment
vas-tu? T'as tourné la page?". Vous pourriez aussi être abasourdie
d'entendre quelqu'un qui veut vous revoir heureuse dire, après à peine 8 mois:
"Elle ne décrochera donc bien jamais!" Peut-être serez vous stupéfaite quand les
gens vous affirme " Mais tu n'es pas seule! La personne disparue est dans
ton cœur". Cela peut être déconcertant de constater l'ignorance
des gens concernant le deuil et ce qu'il fait vivre. Vous pourriez
vous sentir très seule à vivre des émotions qui
surgissent sans crier gare, même si cela ne paraît pas dans votre visage.
Cette tristesse est ce qui vous permettra d'accepter
la réalité de la perte de ce qui vous était cher. Laissez-vous vivre la douleur reliée au
deuil. Elle vous aidera éventuellement à
vous ajuster à un environnement dans lequel ce qui est perdu manque, et à
reprendre l'énergie émotionnelle investie pour la mettre dans une nouvelle
relation.
Pensez à la personne disparue,
laissez-vous évoquez les meilleurs moments de vos souvenirs et ressentir
ce qui vous manque de sa présence. Laissez-vous
pleurer. Vos larmes vous soignent.
Mes meilleurs moments :
Ce qui me manque le plus :
Laissez-vous du temps pour pleurer et
identifier des moments de la journée où vous pouvez vous laisser aller à
pleurer. Cela vous permettra de vous
sentir plus en contrôle et plus libre le reste de la journée.
Le meilleur moment pour me donner la
permission de pleurer :
Donnez-vous le temps de vivre le
deuil. Le temps nécessaire varie d'une
personne à l'autre. Permettez-vous de le
vivre à votre propre vitesse.
Combien de temps suis-je prêt à me donner
pour vivre mon deuil? D’où vient cette
attente?
Le deuil normal est associé à certains
symptômes. Il est normal d'avoir
l'impression de voir ou d'entendre la personne disparue, d'avoir de la
difficulté à croire à la réalité de la perte, de devenir distrait, de sentir
une présence. Ces impressions
s'atténuent progressivement avec le temps.
Mes symptômes :
Attendez-vous que les dates les anniversaires
de la perte (un an après le départ) et les fêtes (Noël) soient des moments
difficiles.
Quelles sont les situations, les contextes
ou les moments qui amplifient ma souffrance?
Le deuil laisse souvent la personne avec des
situations inachevées. Laissez-vous
vous imaginer ce que vous auriez aimé dire à la personne disparue avant qu'elle
ne parte.
Qu'est-ce que vous auriez aimé qu'elle
sache ou qu'elle comprenne?
Certaines personnes trouvent cela utile
d'écrire une lettre à la personne disparue, une lettre où elles se permettent
d'exprimer tout ce qu'elles ont à exprimer au sujet de cette perte (la peine,
la colère, la peur, la culpabilité, le soulagement, etc.). Ce n'est pas le genre de lettre que l'on peut
écrire tout d'un coup. C'est important
de se donner le temps de vivre les motions qui montent lors de l'écriture, de
se laisser "digérer" la réalité du deuil. Il s'agit d'une occasion pour vous de mieux
comprendre et de mieux vivre tout ce qui se passe en vous.
La créativité soigne. Permettez-vous d’exprimer ce que vous vivez à
votre façon, à travers l’écriture mais aussi à travers la peinture, le dessin,
la musique…
La personne, la situation ou la chose que
vous avez perdue était importante et unique pour vous et personne ni rien ne
pourront jamais les remplacer complètement.
Cette personne remplissait toutefois des besoins qui sont les
vôtres. Vous demeurez avec des besoins
insatisfaits qui sont les vôtres. Bien
que cela soit difficile à imaginer pour vous actuellement, on peut penser
qu'une partie de ces besoins pourront être satisfaits d'autres façons.
Mes besoins insatisfaits :
Comment un jour pourrai-je peut-être en satisfaire
une partie si tout va pour le mieux ? :
Certains vivent des deuils inutiles en
considérant une perte hypothétique comme un événement actuel. Johanne craignait de perdre son époux
policier suite à son retour aux études en techniques policières. Elle l'imaginait déjà en amour avec une jeune
étudiante du Cégep. Elle réagissait
comme s'il l'avait déjà quitté. Elle en
vint à reconnaître qu'elle n'avait aucun indice qui lui laisserait croire en
l'infidélité éventuelle d'un mari qui lui avait toujours été loyal. Elle travailla alors sur sa propre insécurité
et la faible estime qu'elle avait d'elle-même qui l'amenait à croire qu'elle
pourrait facilement être remplacée par une autre femme.
D’autres
personnes vivent des deuils compliqués parce qu’ils croient que s’ils
souffraient moins, ils trahiraient la personne disparue, qu’ils accepteraient
quelque chose d’inacceptable, qu’ils deviendraient complices d’une injustice,
qu’ils disqualifieraient l’importance de ce qu’ils ont vécu auparavant.
Les
croyances qui compliquent mon deuil :
Le deuil est le prix que l’on paie
pour l’attachement. Pour certains,
l’engagement se fait de façon superficielle.
Ils viennent et vont sans que cela les bouleverse beaucoup. Pour d’autres, l’attachement est
profond. La séparation sera
déchirante. Comme si on leur coupait un
bras ou une jambe. Ils ont confié à l’autre
la gestion de l’argent, la gestion des relations avec le monde extérieur, la
gestion de leur monde affectif et émotionnel ou même leur sentiment de valeur
personnelle ou leur capacité de se débrouiller dans des situations
complexes. En perdant l’autre, ils se
retrouvent avec la tâche de reprendre possession de parties d’eux-mêmes qu’ils
avaient mis en veilleuse et d’apprendre ce qu’ils n’avaient pas eu à apprendre
jusqu’ici.
Parties de
moi que j’ai confié à la personne disparue :
Ce que je
dois maintenant apprendre, développer ou retrouver en moi :
Une fois que
le processus du deuil se poursuit, les gens sont confrontés avec le défi de
réapprendre à vivre. Certains se croient
encore victime du deuil alors qu’ils se confrontent en réalité aux difficultés
normales qu’éprouvent ceux qui doivent créer de nouvelles relations pour
satisfaire leurs besoins.
Quels
genres de personnes aimerais-je ajouter à mon réseau actuel? Où puis-je trouver ce genre de personne au moment
où je serai prêt à leur faire un peu de place dans ma vie?
Nouer
et dénouer des relations peut prendre beaucoup d’énergie. Permettez-vous de prendre le temps dont vous
avez besoin. Imaginez qu’il peut y avoir
une suite à votre vie ne signifie pas qu’il faut vous précipiter immédiatement
dans des relations prématurées.
Quels
seront les premiers signes encourageants au sujet du progrès de mon deuil?
Comment
saurais-je que j’ai franchi une étape importante de mon deuil et que je suis
prêt(e) à reconstruire ma vie?
Références
Hétu,
Jean-Luc (2006). Vivre un deuil.
Montréal : Éditions du Méridien.
175 pages.
Regnier, Roger et Saint-Pierre, Line (2007). Surmonter
l'épreuve du deuil - 4e édition.
Montréal : Éditions Québécor.
244 pages.
Fréchettte-Piperni,
Suzy (2005). Les rêves envolés : traverser le deuil d’un tout petit bébé. Boucherville : Éditions de
Mortagne. 463 pages.
Psychologue en milieu hospitalier depuis plus de 35 ans, Bruno Fortin s'intéresse particulièrement aux stratégies d'adaptation face aux situations stressantes de la vie. Il a une vaste expérience d'enseignant et d'animateur d'ateliers. Il est l'auteur et le coauteur de nombreux ouvrages dont Comment améliorer votre médecin? aux Éditions Fides.
Janvier 2020, © Bruno Fortin, psychologue. Tous droits réservés.